Archives départementales, Culture

Petites histoires d'archives #1_ Le compoix de Canet d’Aude a été volé !

Archives départementales de l’Aude C 1142

Noël 1723 : le vol du compoix de la commune ébranle la communauté de Canet d'Aude. Récit de la disparition d'un document essentiel...

Cette chronique vous est présentée dans la rubrique des petites histoires des archives

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Le 7 mars 1723, le conseil général des habitants de Canet s’est rassemblé, à la demande des consuls Jean Cathala et Jean Fabré.

Etaient également présents monsieur Charles François Delrieu, curé du-dit lieu et Paul Berthomieu, lieutenant et juge.

Le premier consul, Jean Cathala, leur a rappelé des faits que nul ne pouvait ignorer : le 24 décembre passé, pendant la messe de minuit, « quelques voleurs et assassins » entrèrent dans une chambre de la maison du greffier consulaire et lui « enlevèrent, pillèrent et volèrent entre et pardessus plusieurs choses, le compoix terrien dont la communauté se servoit pour faire les impositions sans qu’on fut dans la possibilitté de les surprendre pour en poursuivre le chastiment et punition de ce témeraire attentat ».

Le greffier porta aussitôt plainte devant le représentant du juge et on procéda à l’audition de témoins, en vain : le compoix était définitivement perdu ! Les voleurs avaient peut-être « esgaré, brisé ou bruslé, led(it) compoix par malice ou autrement pour n’estre pas découverts ».

Une communauté ne pouvant rester sans compoix, il est donc décidé de faire procéder au plus tôt à un nouveau compoix « pour deuement asseoir et departir legitimement lesd(ites) impositions », car telle est l’utilité principale de ce document :  dès le XIVe siècle, les communautés ont besoin de registres permettant de déterminer l’impôt foncier. Les compoix constituent ainsi, d’une certaine façon, les ancêtres de nos matrices cadastrales.

Leur objectif est bien le recensement exact de tous les biens fonciers imposables, propriétaire par propriétaire, pour permettre ensuite la répartition de la taille entre les habitants.

Cette décision de réaliser un nouveau compoix ne peut être prise par les seuls consuls et doit être délibérée par l’assemblée réunie ce 7 mars 1723. Les «susd(its) h(abit)ans assemblés, considérant l’importance du fait proposé, sachant la veritté de lad(ite) proposition, comme ayant dans ce temps là acouru au secours, sans qu’ils eussent peu se saisir desd(its) malheureux assassins, bien qu’ils eussent entouré, et bloqué la maison pour ce faire ; ont de commune voix, dit estre très nécessaire, à cause dud(it) malheur, de faire un nouveau comp(oi)x terrien ».

Les consuls vont ensuite à Montpellier pour obtenir la permission de la cour des Aides de réaliser un nouveau compoix. Cette institution financière de la province du Languedoc avait été fondée par Charles VII en 1437. 

Une fois l’accord obtenu, il faudra alors procéder au choix des habitants de la communauté qui seront « les indiquateurs et l’agrimanseur des bâtiments et terres, qui seront et doivent estre alivrées », c’est-à-dire estimées.

La réalisation de ce nouveau document a un coût ! Et lors de la prochaine imposition, la somme de 600 livres devra être inscrite au budget communautaire, avec autorisation de l’intendant.

Ces décisions sont ensuite copiées dans le cahier des délibérations de la communauté dont le document ci-dessous est une copie.

Pour aller plus loin

Si vous voulez en apprendre davantage sur les compoix, rendez-vous à la rentrée pour un atelier sur les archives foncières dont le premier volet sera consacré aux compoix et au cadastre.

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