Archives départementales, Patrimoine

Archives vagabondes #8 Au service du roi de Suède : Pontus de La Gardie

Pontus de La Gardie
AD 11 3 Fi 232 © Archives départementales de l'Aude

Parcours d’un audois qui devint, au XVIe siècle, conseiller, général et diplomate au service des rois de Suède.

 

Cette chronique vous est présentée dans la rubrique Archives vagabondes

 

Publié le

Naissance dans le Minervois


Pontus naquit aux alentours de 1525-1535, probablement à Caunes-Minervois où son père, Jacques Escoupérier, possédait une maison. Ce dernier, roturier, acquit plusieurs terres afin d’appartenir à la petite aristocratie locale. Il est probable qu’il se soit aussi intéressé au commerce de draps, comme beaucoup de caunois à l’époque. Sa mère reste inconnue. L’enfant aurait passé une partie de sa jeunesse au monastère bénédictin de Montolieu.

Ses premières batailles militaires


Pontus partit combattre en Italie (1551-1556) pour le compte du roi de France Henri II, et c’est là qu’il s’engagea dans une carrière militaire. Fort de ses victoires dans le Piémont, Henri II décida de partir conquérir le royaume de Naples. Pendant ce temps, les troupes espagnoles de Philippe II gagnèrent la bataille de Saint-Quentin, dans l’Aisne, en 1557, bataille à laquelle participa Pontus. On le retrouve l’année suivante en route pour l’Ecosse, où Henri II espérait défendre la cause catholique. 

Du Danemark à la Suède


Après son aventure écossaise, Pontus voulut poursuivre son engagement militaire, mais la France, où débutaient les Guerres de religion, s’était retirée des principaux conflits européens. À cette époque, la Scandinavie attirait les jeunes nobles comme lui, en quête de gloire et de fortune. Frédéric II de Danemark s’opposait alors à Eric XIV de Suède. Pontus choisit de combattre dans l’armée du roi danois et fut fait prisonnier par les suédois pendant le siège de la ville de Varberg en 1565. Lors de sa captivité, il choisit de changer de camp et de rejoindre l’armée suédoise. Les français n’étaient alors pas rares à la cour de Stockholm.
Il commença alors une carrière de diplomate et dirigea une ambassade envoyée auprès du roi de France, par laquelle il obtint un renfort militaire de 3000 fantassins et de 3000 cavaliers pour le roi de Suède. Cette confiance prouve qu’il avait réussi à obtenir les faveurs du roi en quelques mois. Eric XIV offrit alors les services de Pontus à son frère Jean, duc de Finlande. Il quitta l’entourage royal au moment où le souverain suédois souffrait de crises de démence. 

 

Ambassadeur du nouveau roi de Suède


Une conjuration aristocratique, menée par Jean, voulu renverser Eric et c’est Pontus en personne qui s’empara de la ville où Eric s’était retranché (1568). Il participa à la capture du roi et en fut remercié par Jean qui prit le nom de Jean III, et le fit chevalier en 1569.
Cependant, la guerre contre le Danemark se poursuivait. Pontus tomba aux mains de son ancien maître, Frédéric II, et fut emprisonné jusqu’en 1570 et au traité de paix de Stettin, qui mit un terme au conflit. En 1571, Jean III offrit à Pontus la baronnie d’Eckholm.
Le nouveau roi de Suède craignait de plus en plus le danger venant de l’Est, et voulut convaincre les autres puissances européennes de se soulever contre la Russie. C’est Pontus qui fut envoyé dans le Saint-Empire-Romain-Germanique et les Pays-Bas espagnols pour s’entretenir avec leurs dirigeants. Il essuya plusieurs refus avant d’arriver en France où il fut reçu à la cour de Charles IX, à Blois, en 1572, montrant à nouveau ses talents de diplomate.
Après quelques années en Estonie, en qualité de vice-roi (1573-1576), Pontus fut chargé d’une mission délicate : faire rentrer l’église luthérienne suédoise dans l’orthodoxie catholique. Il se rendit à Rome avec les conditions de Jean III pour faire revenir l’Eglise suédoise dans le giron de l’Eglise romaine : autorisation pour les prêtres de se marier, usage liturgique de la langue vulgaire, reconnaissance de l’autorité royale sur les évêques. Evidemment, s’en était trop pour Grégoire XIII !

Retour aux combats


Pontus regagna la Suède en 1578, et le roi fit appel à lui pour combattre les Russes en Estonie. Il fut nommé gouverneur militaire de Finlande en 1580. Avec 7000 hommes, il se lança à l’assaut de la forteresse de Kexholm sur les bords du lac Ladoga (voir carte ci-dessous). La place capitula et la Suède s’empara de cette région. L’année suivante, Pontus, à la tête de 3000 hommes, conquit l’Ingrie. Quelques mois plus tard, avec 8000 fantassins et 3000 cavaliers, il s’attaqua à la ville de Narva, empêchant ainsi les Russes de contrôler les ports sur la Baltique.


Entre-temps, le roi de Suède lui donna sa fille naturelle en mariage, la princesse Sophie Gyllenhjelm, avec laquelle il ne vécut que cinq ans. En effet, le 5 novembre 1585, Pontus de La Gardie, affaibli et malade, périt accidentellement en se noyant dans un fleuve estonien. 

Bibliographie


Richard (P.-G.), Pontus de La Gardie, un languedocien à la conquête de la Baltique, Archives départementales de l’Aude, 1988.
Journet C., « Pontus de La Gardie », Bulletin de la Société d’Etudes Scientifiques de l’Aude, 1958, tome LIX, p. 55-64.
Senemaud E., « Biographie de Pontus de La Gardie », Bulletin de la Société des Arts et des Sciences de Carcassonne, 1849-1851, 1ère série, tome 1, p. 27-47.