Patrimoine, Archives départementales

Les Archives du général Lapasset rejoignent les Archives départementales de l’Aude

Photo du Général Lapasset © AD11

Grâce au don de Madame Claude Almayrac, les archives du général Lapasset (1817-1875) sont entrées dans les fonds des Archives départementales de l’Aude cet été. Elles seront dépoussiérées, classées, inventoriées et conditionnées afin d’être mises à disposition de nos lecteurs. Ce fonds, d’une grande richesse par la diversité des documents qui le composent et par l’importance de la carrière de ce général aux racines audoises, est un grand apport pour l’histoire de notre département.

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Vous connaissez peut-être l’ancienne caserne d’infanterie de Castelnaudary qui a porté le nom du général Ferdinand Lapasset de 1879 à 1991, avant d’être réhabilitée et devenir l’espace culturel Tuffery il y a quelques années. C’est en 1874 que le Ministère de la Guerre autorisa la ville de Castelnaudary à posséder une garnison et c'est grâce au Général Lapasset, qui offrit à la ville le terrain destiné à la construction de la caserne, qu'elle put être réalisée.

Après avoir intégré l'École militaire de Saint-Cyr en 1835, il part pour l'Algérie en 1840 où il est rapidement promu au rang de capitaine. Ce fonds est composé d’une importante correspondance qu’il entretient avec sa famille depuis l’Algérie, pendant 28 ans, et de rapports qu’il envoie à l’Empereur Napoléon III sur la situation en Algérie pendant cette phase de la colonisation.

 

Entretien de l’Empereur avec le colonel Lapasset le 30 juillet 1862 à Vichy.
L’Empereur : Depuis combien de temps êtes vous en Algérie colonel ?
Le Colonel : Sire, depuis 23 ans, dès ma sortie de l’école.
L’Empereur : Quelles sont, d’après vous, les principales causes du peu de progrès de toutes sortes en Algérie ?
Le Colonel : Il y en a plusieurs, sire ; la première selon moi, serait la séparation des administrations civile et militaire opérée presqu’au lendemain de la conquête, et qui a entrainé la fâcheuse distinction des territoires civils et militaires. Ainsi, pour bien faire comprendre toute ma pensée à votre majesté, je lui exposerai qu’à Oran, par exemple, il y a un général de division qui administre 6000 européens et 460 000 indigènes ; à côté de lui il y a un préfet qui, avec les mêmes pouvoirs et la même règlementation, est chargé des intérêts de cinquante mille européens et de trente mille indigènes. […] En multipliant les rouages on a multiplié les fonctionnaires et les dépenses en dehors de toute proportion avec le nombre des administrés.


Et sur la colonisation en cours de l’Algérie :
La transformation de presque toutes les villes de l’Empire, l’ouverture des voies ferrées secondaires ont dépeuplé nos champs ; ainsi dans les environs de Béziers, de Narbonne, on paie jusqu’à 3 Francs la journée d’un paysan travaillant aux vignes. Comment, dans de pareilles conditions, attendre une émigration européenne ou française ? [...] Il se créé, en ce moment, dans ma subdivision, un centre européen de 48 feux, c’est celui de Bouguirat. Salubrité, fertilité, abondance d’eaux, proximité de grands centres et d’une route impériale, marché important, rien ne lui manque. En vue d’assurer son peuplement par de bons éléments, j’avais sollicité l’autorisation de choisir, dans mon arrondissement, un certain nombre de familles de cultivateurs.
 

Promu général de brigade en 1865 il est rappelé en Métropole et se distingue pendant la guerre de 1870, jusqu'à la capitulation de Metz où il est fait prisonnier. Sa correspondance depuis Metz sera à découvrir également dans ce fonds.
En 1871, il est nommé sous-préfet de Limoux puis est élu conseiller général du canton de Salles-sur-l'Hers. Lorsqu’il n’est pas dans l’Aude, au château de Montauriol, c’est son épouse qui gère son image politique.

Alger, le 1er avril 1871
Chère amie, tu es un charmant agent électoral, on ne pouvait faire mieux. Après la lecture de ta lettre du 20 [mars]qui m’est parvenue hier en même temps que celle du 22, je pense qu’il faut stopper pour le moment. La France est si troublée que ce serait folie de songer à compléter l’Assemblée ou à renouveler les conseils généraux, tout au plus voudra t-on procéder à l’élection des municipalités pendant que M. Thiers aura cette sagesse et qu’il saura attendre que le calme soit un peu revenu pour faire n’importe quelles élections, nous devons faire comme lui. S’il en était autrement, examinons les cas. Je serais d’avis de ne pas poser ma candidature s’il ne s’agit que d’une élection partielle. Dans le cas d’une constituante, je la poserais dans les arrondissements de Limoux et de Castelnaudary.[…]
Veille à ma serre et à mes chères fleurs, prie tonton de faire travailler un peu les massifs, que je retrouve notre très cher nid en bon état. […] Je te donne mille baisers ma chérie, dis aux enfants de m’écrire, je leur répondrai. Je les embrasse tous, amitiés aux grands, général Lapasset.


Enfin, des documents personnels, des carnets de note, des documents comptables viennent révéler toutes les facettes de ce grand personnage.
Nous remercions chaleureusement Mme Claude Almayrac pour ce don et M. Edward  Tompkins d’avoir réalisé une première étape dans le classement de ces documents.