CNRD 2020/2021

Encourager le travail de Mémoire chez les jeunes est une volonté du service éducatif des Archives départementales de l'Aude, notamment au travers de son programme Ambassadeur de la mémoire. Dans cette optique, nous vous proposons des documents issus des fonds des Archives départementales pour alimenter la réflexion des jeunes sur le thème 2020/2021 du Concours National de la Résistance et de la Déportation: "1940 entrer en résistance: comprendre, refuser, résister" .

 

Actes de résistances

En 1940, le département de l’Aude se situe en zone libre, il ne sera occupé qu’en novembre 1942. De fait, les premiers actes de résistance sont essentiellement tournés contre le gouvernement de Vichy.

Résistances socialistes 

Non au vote de confiance du maréchal Pétain (10 juillet 1940).


Dans l'ouvrage La Résistance audoise (1940-1944): tome 1 / présentée par Lucien Maury. - [Carcassonne] : Comité d'Histoire de la Résistance du département de l'Aude, 1980. - 449 p. côte 940.53 MAU/1 , Lucien Maury nous présente un premier acte de résistance socialiste auquel ont participé deux députés de l'Aude, le non au vote confiance de Pétain le 10 juillet 1940:

Le 10 juillet 1940, le jour même où Jacques Duclos et Maurice Thorez lancent leur message au Peuple de France l'appelant à la lutte contre Vichy, le Parlement Français issu des élections de 1936, vote la confiance à Pétain. Sur plus de 700 parlementaires que comptent la Chambre des députés et le Sénat réunis, c'est par 569 voix contre 80 et 17 abstentions que ces deux Assemblées accordent les pleins pouvoirs au tandem Pétain-Laval. Parmi ces 80 figurent le sénateur de Chambrun(non inscrit), père Gilbert de Chambrun, futur chef de la résistance de notre région R3 (Montpellier), le député radical socialiste Henri Gout et Léon Blum député de Narbonne, ancien président du conseil[...].Sur ces 80 opposants, 31 seront arrêtés et assignés à résidence surveillée, dont Henri Gout et Bruguier, 10 déportés dont 5 jamais revenus, 2 furent assassinés: Camel et Max Dormoy. Les députés communistes ne purent voter étant mis hors la loi depuis 1939 pour délit d'opinion, par le gouvernement Daladier. Mais cette majorité écrasante de 569 voix contre 80 en faveur de Pétain montre qu'il fut considéré par la classe politique française comme le "sauveur " du moment . C'est dire que, à l'image de sa représentation nationale, la majorité des Français acceptent la défaite, et que la résistance est le fait d'une minorité, dans l'Aude comme ailleurs.

Ce texte est à retrouver en intégralité dans notre sélection de documents. 

 

Démission collective du conseil municipal de Narbonne (4 novembre 1940)

Le vote des 80 opposants socialistes le 10 juillet 1940 a des conséquences sur l'organisation administrative de la France. Il s’ensuit la dissolution de nombreuses municipalités, en particulier celles de gauche comme c’est le cas de Narbonne, dont le maire est le Docteur Lacroix. Pour satisfaire la politique de Pétain, le conseil municipal narbonnais est dissous le 4 novembre 1940 et son maire socialiste est forcé à démissionner à cause de la politique de « Révolution Nationale» voulue par Pétain pour éviter les oppositions locales. Nous disposons de documents sur cette démission collective. 

Le docteur Lacroix est ici celui qui propose la démission collective. La dissolution est vécue comme une « sanction » de la part de l’Etat, car la décision est totalement arbitraire, et non démocratique. La démission de l’assemblée municipale n’a pas de véritable valeur administrative (car la municipalité est déjà officiellement dissoute). Mais Cette démission est un message de contestation voire de résistance (en écho à l’attitude de Blum et Gout lors du vote de confiance à Pétain). Achille Lacroix s’expose déjà comme un éventuel « suspect » par cet acte et continuera son engagement dans la résistance au fil des années, notamment en devenant membre du mouvement Combat en 1941.

Résistances communistes 

Les premiers actes de Résistance sont également l’œuvre de mouvements en train de se constituer et de certains groupes politiques agissant dans la clandestinité, notamment le parti communiste.

Témoignage

Toujours dans l'ouvrage La Résistance audoise (1940-1944): tome 1 / présentée par Lucien Maury. - [Carcassonne] : Comité d'Histoire de la Résistance du département de l'Aude, 1980. - 449 p. côte 940.53 MAU/1,Etienne Rives, fermier agriculteur à Fares près d’Alzonne, officier de réserve alors père de 7 enfants, évoque ses premiers pas dans la Résistance en 1940:

La forme initiale diffuse et cachée, écrit Etienne Rives celle qui ne se mesure pas, que bien  des historiens, qui ont besoin de hauts faits, de batailles, de procès, d’exécutions et de tortures, ont, selon nous, mal appréhendée, mal expliquée, c’est la résistance de la clairvoyance et de la prospective.
Dès juillet 1940, convaincre ses proches, le voisin, le passant, l’interlocuteur occasionnel, que la France ne peut vivre éternellement à genoux, ou dans l’attente d’un miracle militaire, qu’elle peut compter sur ses alliés, sur le sursaut d’honneur que d’autres peuples ne manqueront pas d’avoir devant la hideuse conception de la société nazie, « Que la nuit finira », c’était le soucis du cœur et de l’intelligence de certains.
Cela commença dans notre famille par l’achat d’un petit livre bordé d’un ruban tricolore : la théorie du Général de Gaulle sur l’armée blindée(1938) et par la lecture de « Mein Kampf » en traduction intégrale que les officiers allemands, plus tard en novembre 1942, s’arrachèrent des mains, chez Jacques Monod à Marseille, rempli de curiosité insatisfaite et de doute sur les chances de victoire sur le nazisme .[...]
Petits actes quotidiens, comme l’opposition à l’affichage du portrait de Pétain dans les bureaux, lecture critique des journaux, opposition à l’enrôlement d’office dans les légions du Maréchal par le délégué du village (« Nous vous dénoncerons, si vous ne voulez pas adhérer, comme hostile »), déformation naïve  et joyeuse par les enfants des chants obligatoires de l’école etc.
Casser le mythe d’une entente possible de la France et de l’Allemagne nazie, sortir des erreurs politiques du pays, voir très loin et très haut, alors qu’on mangeait des topinambours.[...] 
Cette résistance, plus ou moins courageuse, mais efficace à la longue, se distinguait très vite de l’opportunisme de nombreux Français qui, astucieusement à leurs propres yeux, se ménageaient une porte de sortie dans tous les cas.[...]
En somme, avec des moyens dérisoires, mais avec continuité-car cela commença pour certain avant et pendant la drôle de guerre- avec ténacité, avec entêtement, avec foi, s’efforcer d’accomplir, à sa place, cette tâche immense : après l’écroulement général de 1940, refaire la morale à la France. 

Etienne Rives qui deviendra plus tard le chef de la chaîne «  Claude-Rives » du réseau de renseignement Fred-Tommy-Brown.La version intégrale de ce témoignage fait partie de la sélection de documents.

Répressions

Le gouvernement de Vichy systémise en 1940  la surveillance de ses opposants politiques et accentue la répression des actions de résistance.

Différents types de répressions

Différents profils de suspects

La lecture de fiches individuelles de suspects et internés extraites du fichier des surveillances  montre différents profils de personnes en ce qui concerne leurs opinions politiques, les motifs de leur suspicion et d’internement, leur situation familiale, leurs professions et leurs sanctions. En voici une petite sélection sur l'année 1940: 

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