Les Archives départementales de l’Aude
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Archives départementales

Petites histoires d'archives #10 Du crieur public à la messagerie informatique

Image du garde champêtre de Cenne-Monestiès
Image du garde champêtre de Cenne-Monestiès (19 Dv 1/355) © AD AUDE

Comment informait-on autrefois la population des faits importants et événements rythmant la vie de la commune, et diffusait-on les nouvelles nationales au plus grand nombre, comme les mesures à respecter en temps de confinement par exemple ?  

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Depuis le début du confinement de la population, dû à l’épidémie de Coronavirus, les moyens techniques modernes de communication (téléphones mobiles, internet, messageries électroniques, réseaux sociaux,…), qui jouaient déjà un rôle essentiel, ont pris une importance encore plus grande dans notre quotidien. Ils constituent dorénavant les principaux vecteurs d’information, détrônant peu à peu le courrier postal et la télévision. Désormais, on se parle à distance, on s’envoie des courriels, on chate et on se transfère des vidéos pour remplacer les traditionnelles réunions, rassemblements, fêtes et autres rencontres physiques interdites. 


Ce souci de diffusion de l’information au plus grand nombre, qui caractérise notre époque, n’est pourtant pas nouveau et a toujours constitué une des préoccupations majeures des autorités politiques et administratives. Dès l’Antiquité, des crieurs publics existent dans les villes, où ils sont chargés d’annoncer diverses nouvelles, en se déplaçant à travers les différents quartiers. Au Moyen Age, où l’affichage est inexistant, il s’agit d’une fonction essentielle, rétribuée sur les finances de la commune. Les crieurs portent souvent une livrée aux armes de la ville. Pour annoncer leur prise de parole et obtenir le silence, ils utilisent fréquemment  une clochette, une trompette ou un tambour, qui leur vaut parfois l’appellation de tambour de ville.


Dans le monde rural, ce sont les gardes champêtres qui assurent  généralement  cette fonction. Principalement chargés de la police rurale (protection des récoltes, chasse, pêche,…), ils apparaissent dès l’époque carolingienne dans les coutumes provinciales. Sous l’Ancien Régime, ils sont souvent mal aimés des villageois, à cause des amendes qu’ils infligent. La Révolution de 1789 en fait des fonctionnaires municipaux, qui doivent savoir lire et écrire et prêtent serment devant le juge de paix.  

Souvent recrutés parmi les anciens militaires, ils proclament donc à la cantonade, avec roulements de tambour à l’appui, les diverses annonces officielles des autorités communales et préfectorales (ban des vendanges, recensement militaire, arrêtés de voirie,…) et les avis de passage des commerçants ambulants. Ils constituent donc alors, avec la presse locale et régionale, un rouage fondamental de la vie sociale, et sont parfois photographiés par les éditeurs de cartes postales.

Après la Seconde Guerre mondiale, dans les villages et les bourgs, on assiste fréquemment à la mise en place d’un réseau de hauts parleurs, qui remplace dès lors les déclamations solennelles du garde. Les annonces sont faites au micro mais, selon la qualité du son, demeurent plus ou moins compréhensibles par les habitants. Les jours de marché, les commerçants  fournissent d’ailleurs à la mairie de petits textes mettant en valeur les qualités de leurs marchandises et signalant les bonnes affaires. Certains de ces fugaces documents, pourtant destinés à la corbeille après utilisation, peuvent parfois se retrouver dans des fonds d’archives communales, comme par exemple dans ceux d’Ornaisons. Les queues de vache du boucher y voisinent alors avec les slips pour hommes de toutes tailles du marchand de vêtements.

A Talairan, toujours dans les Corbières, la chronique locale raconte même que l’employée municipale chargée des annonces profitait de sa situation pour glisser quelques messages personnels entre deux informations commerciales, à l’intention de son mari notamment, ainsi prévenu qu’il devait rentrer à la maison pour le déjeuner ou le dîner ! A bon entendeur, salut !


Aujourd’hui, outre l’affichage (parfois électronique)  et le téléphone toujours utilisés, c’est bien souvent par mél et grâce à leurs sites internet que les communes, grandes et petites, font part à leurs habitants des informations qui les concernent. Les bruits d’ordinateurs semblent bien avoir définitivement remplacé les cris et autres roulements de tambour. Mais le vieux proverbe reste d’actualité : un homme averti en vaut deux !