Archives départementales, Patrimoine

Archives vagabondes #10 Gustave Peyronel : un cartographe à Madagascar

Portrait en pied de Gustave Peyronel en uniforme et arborant la Légion d’honneur. recadré 42 Dv 9/8 © AD11

Les Archives départementales de l'Aude Marcel Rainaud  conservent un important fonds de négatifs photographiques sur plaques de verre (sous-série 32 Fi), réalisés par Gustave Jacques Peyronel et déposés en 2010 par son petit-neveu, M. Claude Rives. Il contient de nombreux clichés familiaux, mais aussi de précieuses images illustrant les grandes étapes du parcours professionnel de ce militaire.

Cette chronique vous est présentée dans la rubrique Archives vagabondes

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Né à Marseille en 1865, Peyronel fait une belle carrière dans les armes. Polytechnicien, il est nommé capitaine au Service géographique de l’Armée et finit ses années de service avec le grade de colonel. Issu d’une famille protestante, venant à la fois des vallées alpines et des Cévennes, il se spécialise dans la cartographie, alors destinée à faciliter la gestion des territoires transformés en colonies par la Troisième République. Il œuvre ainsi en Algérie, mais aussi en Equateur où il participe à l’expédition chargée de mesurer l’arc du méridien de Quito, entre 1901 et 1906. Toutefois, c’est à Madagascar qu’il exerce d’abord ses talents dans les années 1895-1897. 

Première expédition


Depuis la fin des années 1860, le royaume malgache Mérina, dirigé par les reines Ranavalona II (1868-1883), puis Ranavalona III (1883-1895), cherche à se moderniser sous l’influence des Britanniques. Très actifs dans les réseaux commerciaux de l’Océan Indien, les négociants de La Réunion ne cessent de se plaindre auprès de la métropole des brimades dont ils sont l’objet sur la grande île et réclament constamment une intervention militaire.  En 1883, le gouvernement français précipite les choses en envoyant une escadre navale. Après le refus de son ultimatum, qui prévoit la mise en place d’un protectorat, elle bombarde le port de Tamatave et s’empare de certaines positions situées sur les côtes occidentale et orientale de l’île (Majunga, Morondava…). Toutefois, l’armée française étant très fortement engagée au Tonkin, les troupes ne se lancent pas dans une conquête territoriale systématique. En décembre 1885, un compromis attribue finalement à la France le port de Diego Suarez et une certaine influence sur les affaires malgaches.
 

 

Ce sont bien le déroulement et les difficultés matérielles multiples d’une telle expédition qu’illustrent les photographies prises sur le terrain par le capitaine Peyronel. On y voit le débarquement des bateaux, où s’entassent hommes et animaux, le lent déplacement des colonnes de fantassins avec leurs chariots de matériel et leurs mulets lourdement chargés, les campements de tentes et les popotes. Mais aussi  la messe du dimanche suivie par les européens, les populations indigènes des villes et des villages, les marchés et quelques paysages grandioses, captés au fil des déplacements. En revanche, rien ne transparaît du laborieux travail de cartographie des régions traversées, qui s’illustre notamment par la pose de bornes géodésiques.

 

 

Après l’abdication de la reine et avec le décret du 11 décembre 1895, puis la loi du 6 août 1896, la République Française annexe purement et simplement Madagascar, désormais rattaché au Ministère des colonies. Mais, à l’automne  1896, c’est un soulèvement général qui embrase l’île conquise. Incapable de mater la rébellion, Duchesne est alors remplacé par l’implacable Gallieni, assisté de Lyautey. En octobre, il fait fusiller pour l’exemple l’oncle de la reine et son ministre de l’Intérieur. Quant à cette dernière, elle est exilée définitivement, en février 1897, à La Réunion, puis en Algérie où elle finit ses jours. Dans les années qui suivent, c’est la pacification du territoire malgache qui est menée à marche forcée par l’armée et la nouvelle administration française. Mais, entretemps, Gustave Peyronel a quitté l’Océan Indien et est allé exercer ses talents sous d’autres cieux coloniaux.