Patrimoine, Archives départementales

Dans la Bib' à Léon #2 Eclaircissemens touchant les motifs et les circonstances de la détention de M. Alphonse Mahul

Jacques-Alphonse Mahul © Unknown authorUnknown author, Public domain, via Wikimedia Commons

Jacques-Alphonse Mahul dont le Cartulaire est, encore aujourd'hui, considéré comme un incontournable pour qui veut étudier Carcassonne et ses alentours, a au cours de sa vie fait l'expérience de la prison. Malgré sa disculpation, il a souhaité se justifier dans le court texte, sujet de ce 2e épisode.

 

Cette chronique vous est présentée dans le cadre de la série Dans la Bib' à Léon .

Publié le

Avant de se lancer dans l’écriture du fameux Cartulaire des archives des communes de l’ancien diocèse et de l’arrondissement administratif de Carcassonne, Jacques-Alphonse Mahul (1795-1871), avocat de formation, a mené une carrière politique agitée. « Etudiant libéral sous l'Empire, il avait d'abord été journaliste d'opposition sous Louis XVIII ». Dans le sillage de François Guizot, il s’oppose aux gouvernements ultraroyalistes de la Restauration. Si la Révolution de 1830 lui semble justifiée, les débordements qu’elle provoque le conduisent à la modération : « il était devenu juste milieu ». Il occupe différents postes administratifs et fonctions politiques dans lesquels ses prises de position et son esprit polémique lui valent des déconvenues. Il met fin à sa carrière politique en 1848 pour se retirer dans la demeure familiale de Villardonnel où il se consacrera à l’écriture d’ouvrages touchant à de multiples sujets.

Le texte dont il est question dans ce nouvel épisode a été publié en 1823. Alphonse Mahul sort de prison. Accusé de complot ou plutôt de « non révélation de complot », il expose et justifie au fil des pages les actes qui lui sont reprochés : il a aidé des « libéraux » à s’enfuir en Angleterre en leur prêtant de l’argent… «tout comme il l’aurait fait pour des royalistes» au nom de la pitié et de l’altruisme. 

Quel est en effet celui, parmi les amis de l'Opposition, dont les démarches les plus innocentes ne pourront désormais être entourées de nuages ? Qui osera tendre la main à un malheureux que l'ardeur de sa tête ou la fougue de son esprit ont précipité dans l'abîme ? Qui osera propager les écrits de l'Opposition, en répandre les principes, en prôner l'influence, en populariser les noms, s'il faut répondre des travers d'esprit, des inconsidérations, des imprudences, des troubles, des faiblesses, des peurs, de tous ceux avec qui l'on s'est trouvé en relation ?

Il reproduit dans ses « Eclaircissemens » les échanges de lettres à l’origine de son accusation et qui ont conduit à son arrestation. Il y adjoint ses commentaires, ce qui a pour conséquence de donner une image pour le moins ridicule et partiale de la police et des instances judiciaires et administratives de l’époque. 

Une lettre de Londres, signée V...J, écrite en anglais, datée de 1819 et entièrement étrangère à la politique. Elle n'a été saisie que parce que le commissaire de police, ne comprenant pas l'anglais, n'a pas cru devoir s'en tenir à mes explications.

Cependant, le commissaire de police ne trouvant point parmi mes papiers la lettre qu'il cherchait, avait saisi les pièces suivantes : Deux feuillets imprimés, ayant pour titre, l'un, « Le Vieux Grenadier, chanson », l'autre, « Un Vieux Soldat à l'armée », et au bas de chacun cette indication : de l'imprimerie nationale. Ces deux pièces, d'ailleurs moins audacieuses qu'on pourrait le supposer, ne sont pas cependant de nature à être reproduites ici.

Ces « Eclaircissemens » sont aussi prétexte à évoquer avec force détails les prisons de la Force et de la Conciergerie… dans le souci d’en améliorer les conditions de détention puisqu’il a pu les éprouver de l’intérieur !

 

 

 

On verra que tout n'est pas à blâmer, bien s'en faut, dans le régime de ces établissemens ; on verra tout le bien que sont déjà parvenues à y effectuer, à l'envi, la religion et la philanthropie ; l'on verra aussi de quelles améliorations ils sont encore susceptibles. Membre d'une société religieuse et philantropique où l'on s'occupe des prisons et des prisonniers, j'ai voulu mettre à profit, dans ses vues, l'erreur dont je subissais la peine, et quelque pénible que fût ma position, je crois avoir conservé assez d'impartialité pour voir avec justesse et juger sans passion. 

Les notes manuscrites et les documents d’Alphonse Mahul sont pour la plupart conservés dans le fonds patrimonial du réseau des médiathèques de Carcassonne Agglo.
 

L’exemplaire de cet ouvrage, conservé aux Archives Départementales, est consultable sur place, cote N° 344. Certaines pages sont annotées, sans doute de la main de Léon Nelli.

Un exemplaire de cet ouvrage est consultable en ligne, dans son intégralité, sur le site Gallica.

 

La bibliothèque de Léon Nelli compte d’autres ouvrages d’Alphonse Mahul :

  • Tableau de la constitution politique de la monarchie française selon la Charte, ou résumé du droit public des Français, accompagné du texte des lois fondamentales et de documents authentiques. Paris, A. Désauges. In-8°, IV-744 p. (relié dos cuir, élégants fers de Lebrun). Cote N° 206.
  • Considérations sur l'économie et sur la pratique de l'agriculture adressées aux propriétaires des départements méridionaux qui régissent directement leurs terres. Paris, veuve Bouchar-Huzard. In-8°, 319 p. (relié). Cote N° 264
  • Annuaire nécrologique ou supplément annuel et continuation de toutes les biographies ou dictionnaires historiques, contenant la vie de tous les hommes célèbres par leurs écrits, leurs vertus ou leurs crimes, morts dans le cours de chaque année, à commencer de 1820. Orné de portraits. Paris. In-12°. Cotes N° 1052-1054

Alphonse Mahul a également participé à l’écriture de nombreuses brochures sur des personnalités et des lieux du département, publiées pour certaines dans les bulletins des sociétés savantes et figurant aussi dans la bibliothèque de Léon Nelli :

  • Eloge historique d'Armand Bazin de Bezons, 74e évêque de Carcassonne par M. A. Mahul. Carcassonne, L. Pomiès. s. d. (portrait). Cote N° 1558/23
  • Biographies de dom Jacques Martin et de dom Jean-François de Brézillac. S. l. s. d. Cote N° 1558/105
  • Mémoire sur le rétablissement du siège épiscopal et du chapitre cathédral de Carcassonne, dans l'antique cathédrale de Saint Nazaire, en la Cité. Carcassonne, L. Pomiès. In-8°, 14 p. s. d. Cote N° 1559/212

Le Cartulaire et archives des communes de l'ancien diocèse et de l'arrondissement administratif de Carcassonne, comprenant six  tomes en sept volumes, est quant à lui, conservé dans la bibliothèque des archives et consultable sur place (Cote D° 2533)

 

Liens   :

MARQUIE Claude, « Un érudit en politique : Jacques- Alphonse Mahul (1795-1871) »  La Dépêche du Midi, 2001 ; (consulté le 28-01-2021)

L.G. P.  « Un projet réactionnaire de décentralisation en 1849 », La Révolution de 1848. Bulletin de la Société d'histoire de la Révolution de 1848, tome 2, numéro 7, mars-avril 1905. pp. 45-47 ;  (consulté le 28-01-2021)